Flow
Tome 3
❤ Coup de Coeur !!
Auteur : Yuki Urushibara
Editeur : Big Kana
Date de Sortie : 08 juillet 2022
Genre : Enquêtes / Fantastique
Little Big Bilan

Flow-te-ment ?

Flow, l’œuvre en 3 tomes de Yuki Urushibara, autrice de Mushishi, arrive déjà à sa conclusion. Dans mon article de découverte, je soutenais, que le manga est focalisé sur Shachô, le chat détecteur de flows de Hirota. Mais dans ma critique du tome 2, j’admettais m’être trompé car la focale est en fait centrée, selon moi, sur Chima, l’assistante de 35 ans frappée d’un flow qui lui donne l’apparence de ses 12 ans. Je me permettais même de faire mes prédictions pour le tome 3 de manière assez confiante. Un peu trop confiante même. Vraiment.

Je me suis fait complètement avoir par le flow de ce manga. Je suis, une fois de plus, complètement à côté de la plaque. Est-ce moi qui ai mal compris le propos ? Je crois que non, et je me rends compte que c’était absolument le plan de l’autrice. Tout comme un flow qui a cette capacité d’altérer l’écoulement du temps et de l’espace de manière douce et subtile, Yuki Urushibara a su modifier de manière délicate et imperceptible la focale de son manga pour plonger le lecteur, moi en l’occurrence, dans une distorsion sans rien laisser transparaître. C’est très fort.

Comme dans les deux premiers tomes, l’histoire commence gentiment avec quelques chapitres exposant des flows à résoudre pour Hirota et ses collègues. Les situations sont toujours aussi intéressantes et originales bien qu’elles soient souvent résolues d’une manière similaire : une prise de conscience individuelle ou collective suffit la plupart du temps.

En lisant plus de la moitié du tome, je me rends compte qu’il ne reste plus beaucoup de chapitres pour arriver à une conclusion. Avant de découvrir qu’elles sont fausses, mes prédictions sont encore très présentes dans mes attentes. La conclusion d’un manga étant extrêmement importante pour une expérience de lecture satisfaisante, je commence à m’inquiéter. De plus, malgré quelques petits ajouts pour la caractérisation des protagonistes, toujours très réussie, il n’y pas grand chose à se mettre sous la dent en guise de révélation ou de conclusion.

Et là tout s’accélère. Attention, à partir de là, il y a des spoilers majeurs sur la fin de la série. 

Hirota et Shachô disparaissent et laissent Chima seule dans la cabane qui leur sert de lieu de travail. Tel un flow qui change brusquement un paysage et plongeant la population dans le brouillard et la confusion, la focale se replace sur Hirota et les révélations s’abattent comme un ras-de-marrée sur le lecteur (et sur Chima). 

Alors que je m’attendais à découvrir le fin mot de l’histoire de Chima et du flow qui lui complique la vie, c’est en réalité la situation de Hirota qui vole la vedette et le replace au centre du récit. Ce personnage toujours nonchalant et pudique cachait un terrible secret. 

Le monde de Flow n’est en réalité pas le nôtre, il s’agit d’un monde parallèle ou une copie qui pourrait être apparentée à une sorte de flow géant et persistant, dans lequel apparaissent d’autres flows que Hirota chasse quotidiennement. Mais ce dernier vient donc de notre monde à nous (celui du lecteur), un monde où les flows n’existent pas (à priori). 10 ans auparavant, en suivant son chat et sa sensibilité à ses distorsions, ils ont découvert un passage vers ce monde alternatif dans lequel ils se sont retrouvés prisonniers et forcés de se recréer une existence, celle présentée depuis le premier tome. Un twist complètement inattendu et passionnant pouvant expliquer le comportement nonchalant de Hirota. Ce monde n’est pas le sien, pas étonnant qu’il semble si détaché en permanence.

La situation de la Chima que l’on suit depuis le début reste finalement inchangée, mais la rencontre avec la “vraie” Chima permet de comprendre l’origine de son flow. Comme l’autrice a beaucoup insisté sur le fait que les flows disparaissent facilement lorsqu’une prise de conscience est faite, elle a sûrement considéré que les lecteurs sauront se faire leur propre conclusion vis-à-vis de ce personnage. Et c’est un sentiment plutôt satisfaisant de se dire que le récit est suffisamment bien construit pour qu’elle puisse faire confiance à ses lecteurs pour interpréter la suite de la bonne manière. C’est une véritable force chez un scénariste d’être capable de faire confiance et éviter les explications intempestives à base de coups de coude au lecteur pour être sûr qu’il a bien compris toutes les intentions scénaristiques.

Finalement, tout est bien qui finit bien. Je ressors de ces 3 tomes de flow un peu déboussolé mais très satisfait de m’être fait embarquer dans cette histoire de distorsions subtiles de la réalité et d’avoir moi-même été victime d’un flow, celui du manga qui porte finalement si bien son titre. La réponse était sous nos yeux dès le départ. 

Une conclusion inattendue mais très intelligente.

L’ambiance douce et bienveillante.

La caractérisation des personnages.

Les couvertures.

Une série courte et complète qui a fait le tour de son concept.

Le titre mérite beaucoup plus de visibilité.

Le rythme particulièrement doux et l’ambiance éthérée peut rebuter certains lecteurs en quêtes de sensations fortes (mais je cherche juste à écrire quelque chose dans cette colonne pour chipoter)

 

Ça y est, Flow se termine déjà en 3 tomes. L’autrice a su raconter son histoire tout en immergeant subtilement le lecteur dans son concept pour ne pas seulement lire, mais vivre ce qu’est un flow. C’est brillant ! 

Si vous cherchez une expérience courte et complète, pleine d’originalité et d’émotions, alors plissez un peu les yeux dans le brouillard et cherchez Flow. Vous serez transporté dans une réalité alternative pleine de douceur, d’humanité, de bienveillance et de chats ! Cette série est un coup de coeur, et j’attends impatiemment le prochain projet de Yuki Urushibara !  

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