Genre : Tranche-de-vie / Romance
New Job First Love ?
En 2020, parait dans la collection Life des éditions Kana la série “First Job New Life!”. J’affectionne particulièrement cette collection Life car elle sait généralement toucher de manière très juste.
Malgré mon acquisition des 4 tomes de cette série, je n’ai pas encore pris le temps de les lire. Ils figurent toujours fièrement dans mon effrayante pile à lire. Mais j’y pense régulièrement car ce manga traite de la vie d’une petite agence de graphisme et des ses employés. Ce sujet m’interpelle forcément, étant moi-même graphiste. Comment ? Ce n’est pas sujet de l’article de parler de “First Job New Life” ? Attendez, j’y viens !
First Job New Love ?
Finalement, j’ai bien fait d’attendre avant de lire ces 4 tomes ! Fin 2021, Kana annonce la sortie d’un autre manga de la même autrice, intitulé “New Love New Life!”. Il s’agit de la première œuvre sérialisée de Nemu Yôko, une histoire d’amour se déroulant dans la même entreprise et avec le même groupe de personnages que dans First Job New Life! Bien que les deux histoires se font échos et se suivent, il est tout à fait possible de les lire de manière indépendante et dans l’ordre souhaité. De mon côté, j’ai privilégié la chronologie des événements pour commencer mon immersion dans la vie de l’agence P-Design en commençant par l’histoire d’amour en 3 tomes de Momoko et Tagaya.
Quand on sait qu’une romance tient sur 3 tomes, on peut avoir la certitude que les personnages ne vont pas tourner autour du pot à se mettre dans des situations improbables durant des dizaines de tomes. Au contraire, de temps en temps, il est agréable d’avoir affaire à une série qui va droit au but quant à l’histoire d’amour qu’elle souhaite raconter.
P-Design est une agence de graphisme spécialisée dans les visuels pour les salles de pachinko, sorte de salle très bruyante, hybride entre un casino et une salle d’arcade. Les conditions de travail douteuses de cette start-up sont à la limite de la légalité : heures sup’ quotidiennes jusqu’à devoir dormir sur place ou encore présence d’un collègue exhibitionniste. Ils engagent généralement les nouvelles recrues deux par deux, car ils savent qu’au moins une des deux finira par abandonner son poste dans les premières semaines. Dure dure la vie d’une start-up de graphisme. Malgré les nombreux désavantages de cet emploi dont tout le monde rêve de démissionner, il y règne une ambiance amicale et bon enfant, grâce aux employés qui se serrent les coudes au quotidien. Le rythme effréné des bons de commande ainsi que les délais absurdes nécessitent une rigueur et une concentration maximale, car le commercial rôde et n’hésite pas à tirer les bretelles de tous les graphistes qui laissent des coquilles dans leurs réalisations. Et, d’expérience, je peux vous assurer que même avec la plus grande des vigilances, on y laisse des coquilles vraiment facilement. Mais il ne s’agit là que d’un contexte pour le cœur du récit : la vie sentimentale de Momoko.
New Job New Life ?
Momoko est une nouvelle employée chez P-Design. Passionnée d’illustration, la réalisation d’affichettes et d’autres visuels promotionnels divers pour des salles de pachinko ne l’enchante pas spécialement. Consciencieuse et ambitieuse, elle est persuadée que ses talents d’illustratrice lui seront utiles un jour ou l’autre dans son job. Elle s’habitue rapidement aux heures sup’, mais vivant trop loin pour rentrer en pleine nuit, elle se réfugie souvent chez son copain Tomosu qui habite à deux pas de l’agence. Pratique pour Momoko d’avoir un refuge pour la nuit, mais leur relation se détériore. L’appartement de Tomosu n’est plus qu’un hôtel pour elle, lui-même étant absorbé par la réalisation d’un film de fin d’étude avec ses camarades. Leur histoire d’amour se termine finalement dans de mauvaises conditions.
Après sa rupture, Momo rencontre rapidement Togaya, un grand gaillard barbu un peu plus âgé qui travaille dans le même bâtiment. Cet homme dont le béret lui va aussi bien que sa carrure bienveillante fait découvrir à Momoko les joies des pauses sur le toit du bâtiment, des piques-niques dans les parcs ou encore les ramens en tête-à-tête dans l’échoppe du coin. Bref, Momoko est aux anges, et très vite, elle en est amoureuse, mais. (car il y a toujours un mais)
Old Life No Love ?
Sans rentrer dans les détails pour ne pas gâcher des surprises, les choses ne sont jamais simples en amour. Un secret qui peut ruiner tout ce bonheur peut surgir du passé à tout moment, et des bruits de couloirs vis-à-vis de Togaya se répandent et grouillent parmi les collègues de Momo.
C’est là tout le sujet du manga : une histoire qui pourrait être si simple si tout le monde était honnête et transparent dès le départ. Aucun camp n’est finalement malhonnête, et c’est le mensonge par omission – ou par pudeur – qui crée tous les problèmes de ce futur couple. Togaya n’a en réalité rien à se reprocher, mais c’est sa réticence de dévoiler son passé qui complique une situation qui n’en a pas besoin. De ce point de vue, la leçon est intéressante car tout le monde le sait, en amour, les choses sont souvent compliquées pour rien, car les enjeux s’emmêlent avec les sentiments, les émotions et la crainte de faire un pas de travers et risquer de perdre l’autre.
L’autrice maîtrise d’ailleurs très bien ce sujet et elle s’en moque volontiers, comme par exemple lors de la scène où Momoko revoit son ex-copain pour lui raconter toutes ses mésaventures tout en soulignant à quel point il est facile de discuter avec une personne dont on s’est séparé, quand il n’y a plus aucun enjeu ou d’attente.
New Job New Life !
Là où ce manga fait également preuve de grande justesse, c’est sa manière de représenter la détresse émotionnelle de sa protagoniste et la manière dont cela impacte sa vie professionnelle. De ce point de vue, le choix d’une agence de graphisme est parfaitement judicieux, car comme je le disais en introduction, une erreur est vite arrivée et peut souvent être irréversible et très embêtante. Il est bien connu que les soucis dans la vie sentimentale cannibalisent très volontiers l’attention et la concentration, ce qui est parfaitement incompatible dans un milieu tel que l’agence P-Design. Et les conséquences des expériences sentimentales de Momo vis-à-vis de son travail sont très justes, ainsi que les réactions des collègues. Un gros point fort du titre !
Le manga est également très bien caractérisé, et en 3 tomes, presque chaque personnage est parfaitement cerné. Et ils réagissent tous de manière absolument bienveillante, mais toujours en cohérence avec leurs valeurs.
Mon seul regret se trouve au niveau du contexte en lui-même. Malgré un premier tome montrant à quel point tout le monde aimerait démissionner. Personne n’a l’air réellement malheureux de passer autant de temps, nuit et jour, à son travail avec des conditions et délais tout sauf raisonnables. J’imagine que c’est pour répondre à cette problématique que la suite nommée “First Job, New Life!” a vu le jour, et je me réjouis d’autant plus de le lire pour en savoir un peu plus avec une focale davantage placée sur la profession. Même au Japon, de telles conditions de travail ne devraient pas représenter une norme et le fait que les personnages s’y acclimatent si facilement me dérange.
Visuellement, il faut souligner les superbes couvertures très “graphiques” du manga. Je pense que Nemu Yôko a travaillé dans le graphisme avant de se lancer dans le manga. Ce serait cohérent avec la qualité de ces illustrations ainsi qu’avec ce fort sentiment de vécu dans le contexte du titre. A l’intérieur, le trait plutôt spontané ne brille pas forcément par sa justesse ou ses détails, mais tout est extrêmement agréable à suivre avec juste ce qu’il faut de décors et de tramage. Personnellement j’aime beaucoup.
Niveau édition, ce sont les couvertures “soft touch” habituelles de la collection Life, que je trouve toujours aussi agréable. La tradaptation est également parfaite pour moi.
Une excellente caractérisation des personnages
Momoko est très attachante
Un format en 3 tomes, c’est parfait
Très agréable à lire
Des superbes couvertures avec une très belle patte graphique
Un contexte original
Des conditions de travail affreuses qui devraient poser davantage de problèmes aux personnages
Une romance peut-être trop simple pour certains
Je suis ravi d’avoir attendu la sortie de New Love New Life avant de m’attaquer à cette saga de Nemu Yoko. Le contexte en agence de graphisme résonne particulièrement en moi, bien que je ne cautionne pas du tout les conditions abominables de travail dont les personnages devraient davantage souffrir. Finalement, cette histoire d’amour en 3 tomes est très simple, mais si révélatrice de comment une romance peut dégénérer quand on n’est pas immédiatement transparent, par pudeur et surtout la crainte de faire des erreurs. J’ai beaucoup apprécié et je peux désormais entamer ma lecture de la First Job New Life !